JAMAIS CONTENTE
Aurore est une jeune fille de 13 ans pas comme les autres. Je-men-foutiste sur les bords, elle préfère dessiner des oursons morts plutôt qu’écouter en classe. Jouant avec les nerfs de ses parents et de sa famille, il va falloir l’aide conjuguée d’un groupe de rock, d’un prof remplaçant et d’une bonne dose d’humour pour que l’éclaircie traverse les nuages.
Le monde ado.
Au gré des festivals, la réalisatrice Émilie Deleuze a déjà glané pour Jamais Contente une mention spéciale au Festival de Berlin et un “Young Audience Award” au Prix du cinéma Européen. Genre hautement casse-gueule avec son lot de bonnes grosses idioties même pas dignes de figurer en dessins de marges des copies-doubles de prise de note de mauvais cours de SVT, la comédie d’ados française peine souvent par son rythme, son écriture et son interprétation. Soit quasiment l’ensemble des points de réjouissance de tout divertissement. En adaptant le roman de Marie Desplechin “Le Journal d’Aurore”, Deleuze met les deux pieds dans un plat qu’on a souvent mangé fade, tiède, moue peu convaincante aux lèvres. Le spectateur ronchon va bien rapidement ravaler son venin.
Jamais Contente, c’est d’abord et avant tout un casting impeccable. Voici donc les débuts face caméra de Léna Magnien dans le rôle titre d’Aurore. Difficile d’employer un autre terme que révélation, quand bien même les superlatifs doivent être employés à grand renfort de précaution à cet âge. Le constat est tout de même là : on a beau chercher, difficile d’imaginer meilleur choix pour interpréter une ado subtile, ancrée dans son époque et son état d’esprit mais jamais cliché ni insupportable. Le personnage de Magnien, subtilement insufflée par la direction de la metteuse en scène, transpose idéalement l’écriture de Desplechin dans son contexte filmique. Immédiatement empathique, franchement bluffante par moments, elle n’hésite pas à traiter de tous les sujets, même les plus casse-gueules, sans jamais tomber ni dans le voyeurisme, ni dans le racolage d’époque. Un tour de force, replacé dans son contexte.
Qu’importe quelques fausses notes
Emportés par cette joyeuse tornade, une foule de personnages. À commencer par les parents d’Aurore, interprétés par un duo Patricia Mazuy / Philippe Duquesne au poil. Toujours dans le soin d’éviter l’écueil, Desplechin et Deleuze préfèrent ne pas succomber complètement à déformer leur présence en un simple contrepoint d’autorité ou de contrainte, mais laisse plutôt de l’air aux comédiens pour de subtiles failles et une pointe de tendresse. Même principe, dans un registre un peu plus franchement comique, pour le prof de Français remplaçant Sébastien Couette, merveilleusement interprété par Alex Lutz, et pour la grand-mère Agathe (Catherine Hiegel), épousant avec malice le regard de la sage piquante.
Ce trio Aurore / parents / prof suffit largement à porter Jamais Contente du statut de film strictement ado à un divertissement accessible à tous, certes simple et léger, mais ne subissant aucune faute de goût significative dans son écriture ou dans son scénario. Évidemment, face au rayonnement principal, d’autres personnages en orbite peinent à insuffler une profondeur supplémentaire au film – on pense aux membres du groupe de rock, aux sœurs d’Aurore, entre autres. Il manque aussi une photographie un peu plus homogène et qualitative, sûrement due au budget serré du film. L’important à retenir, c’est que Jamais Contente est un film d’ados qui ne s’y cantonne pas. Fait rare, il prend de la distance sur cette ère de nombrilisme exacerbé. Sans être transcendant, il parviendra pour sûr à arracher plus d’un sourire même aux plus grognons.
La fiche
JAMAIS CONTENTE
Réalisé par Émilie Deleuze
Avec Léna Magnien, Patricia Mazuy, Philippe Duquesne…
France – Comédie, Ados
Sortie en salle : 11 janvier 2017
Durée : 90 min