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LE CONCOURS DE DANSE

Chaque année, des milliers de jeunes danseurs concourent pour le prestigieux Youth America Grand Prix. « Le Concours de danse » dresse le portrait de six jeunes finalistes, âgés de 11 à 17 ans et originaires des 5 continents, tandis qu’ils s’apprêtent à entrer dans le monde professionnel de la danse classique. En dépit des blessures et des échecs, avec ténacité et passion, ces jeunes danseurs deviendront, ou pas, de futures étoiles.

Persévérance.

Un mot qui à lui seul pourrait résumer la vie de tout danseur rêvant d’allier sa passion à une carrière et, par une analogie troublante, les débuts de Bess Kargman en tant que réalisatrice.

De son propre aveu, c’est la réaction narquoise de son supérieur à sa décision de quitter son stage dans une maison de production pour se lancer dans sa propre aventure qui donnera à la jeune femme « le feu » qui aboutira à son documentaire acclamé : Le Concours de Danse. Ayant elle-même étudié le ballet pendant presque dix ans, et passionnée de cinéma depuis son entrée à l’université, il semblait écrit que son choix de premier sujet se porte sur cet univers de paillettes et de sueurs, et que de ses yeux d’initiée, elle lève pour passionnés comme pour novices, le rideau délicat des compétitions d’un art aussi gracieux qu’athlétique.

PAS DE SIX

Présenté pour la première fois au Festival International de TorontoLe Concours de Danse suit six candidats à l’une des institutions les plus prestigieuses du monde du ballet et de la danse contemporaine : le Youth America Grand Prix. Fondé en 1999, et récompensant des talents de toutes nationalités âgés entre 9 et 19 ans, il est la référence en matière d’opportunités de bourses d’études dans les meilleures écoles de danse – l’ambassadeur phare de ces concours qui, selon une tradition quasi ancestrale, ont le pouvoir de faire et défaire une carrière – en deux temps, trois mouvements.

De son background en journalisme, Bess Kargman tire la certitude qu’« une histoire n’est rien sans ses personnages » ; aussi, pour conter le périple des préparations à l’échéance finale, des choix de variations aux costumes, elle nous emmène dans le quotidien de graines d’étoiles aussi charismatiques que déterminées – toutes emplies de cette maturité forgée au firmament de l’effort, et comme seuls la connaissent les sportifs de haut niveau – tout en gardant une étincelle individuelle et attendrissante.

Du prodige Aran à la battante Michaela, du rêveur Joan Sebastian à l’exigeante Miko, de la pétillante Rebecca à la magnétique Gaya, leurs journées coulent au rythme des exercices de pointes, des critiques de leurs professeurs et du soutien de leurs familles qui, sans exceptions, sacrifient tout pour leur donner toutes les chances de réussir.

Parmi ces parcours fascinants, on retient surtout celui de Michaela, orpheline originaire de Sierra Leone témoin du massacre des siens et adoptée par une famille américaine. Atteinte de vitiligo, la danse lui permet à la fois d’exorciser un passé douloureux et son rapport parfois compliqué à son image. Quant au premier émoi qui lie Aran et Gaya, et qui défie leur rivalité supposée au sein du concours, il est à leur image : touchant,  intense, et dont ils nourrissent leurs incroyables performances.

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Sans jamais verser dans le misérabilisme ou l’apitoiement, la caméra met sans tabou un doigt incisif sur l’exigence qui pousse ces jeunes corps à leurs extrêmes limites, rappelant – sans faire l’économie d’un réalisme nécessaire – combien quelques instants de grâces requièrent une discipline draconienne.

DEGAGÉ A LA SECONDE

A mesure qu’approche la finale, la tension monte graduellement, sans effet dramatique vulgaire. La compétition n’est jamais montrée réellement, parce qu’inhérente à un monde où sous les tutus et rubans, si peu sont amenés à transformer l’essai. Un rien peut faire basculer ces jeunes destins – d’une blessure quelques semaines avant la finale, à une chute liée au stress au moment du passage. Dans les coulisses, on se concentre sur ses étirements aux allures de contorsions, occultant comme on le peut les applaudissements particulièrement enthousiastes qui ponctuent telle ou telle performance.

Miko, dont la maman surinvestie culpabilise de l’avoir peut-être trop poussée au point qu’elle rate son premier passage aux pré-sélections, doit rapidement se ressaisir ; et c’est sous l’œil embué de fierté de son professeur qu’elle réalise une variation impeccable, avec un panache des plus sévillan – qu’elle puise dans sa force de caractère plus que dans les volants de son costume.

Quand la remise des prix tombe enfin, c’est le soulagement pour le spectateur qui vient de vibrer pendant une heure et demie – et qui se réjouit, non sans une vive émotion, autant que les lauréats pour qui la vie va changer à jamais.

PREMIERE POSITION

Joséphine Baker affirmait : « Vivre, c’est danser. J’aimerais mourir à bout de souffle, épuisée, à la fin d’une danse ou d’un refrain. » Pour ces danseurs, récompensés comme éconduits, c’est bien de cela dont il est question. La danse, ils la respirent et elle les porte – toujours plus haut, toujours plus loin. En effet, dix ans après avoir été mis en lumière par Bess Kargman, les six petits diamants bruts comptent aujourd’hui parmi les plus beaux joyaux du ballet contemporain.

Injustement réduit à sa dimension compétitrice dans son titre francophone, le documentaire tire sa dénomination originale d’une des sept positions classiques de base de la danse – talons accolés, pieds sur la même ligne. Position de départ, qui mobilise tout le corps, elle illustre tant pour ses pratiquants que pour ce film, l’harmonie entre force et grâce, qui émue, retourne et fascine.


#LBDM10ANS