LES ARDENNES
Un cambriolage tourne mal. Dave arrive à s’enfuir mais laisse son frère Kenneth derrière lui. Quatre ans plus tard, à sa sortie de prison, Kenneth, au tempérament violent, souhaite reprendre sa vie là où il l’avait laissée et est plus que jamais déterminé à reconquérir sa petite amie Sylvie.Ce qu’il ne sait pas, c’est qu’entre-temps, Dave et Sylvie sont tombés amoureux et mènent désormais une vie rangée ensemble.Avouer la vérité à Kenneth pourrait tourner au règlement de compte…
Robin dans les bois.
POUR – « Aussi puissant que Fargo, Trainspotting et les premiers films de Tarantino » : cette envolée lyrique d’Indiewire plaquée sur l’affiche du film Les Ardennes est loin d’être usurpée tant le 1er long-métrage de Robin Pront (27 ans au compteur) impressionne par sa maîtrise. Adapté d’une pièce de théâtre (écrite par Jeroen Perceval, également co-scénariste et acteur du film), Les Ardennes est construit en deux actes : il débute comme un drame familial autour d’un triangle amoureux pour se muer progressivement en un film de genre bourré de références. C’est d’ailleurs cette deuxième partie qui donne toute sa puissance à l’histoire qui s’achèvera sur un twist hallucinant.
Ouvertement influencé par Blue Ruin, Robin Pront parvient à distiller la noirceur qui sied si brillamment à Jérémy Saulnier. Les trois personnages centraux transpirent la misère sociale à laquelle ils sont confrontés, entre anciens petits trafics, boulots merdiques et envie de s’en sortir. Sylvie (interprétée par Veerle Baetens) résume ce dernier leitmotiv en une seule réplique : « Je rêve simplement d’avoir une vie banale ». Banalité qui est loin de définir le style de Pront, avec ses choix affirmés de mise en scène.
Anvers est filmée telle une cité-dortoir, grise et déprimée. Une oppression renforcée par une BO techno, qui sert de manière originale le récit tout en rendant hommage à la culture électro de cette région. Délaissant un urbanisme crade, c’est dans les Ardennes que le film finira par puiser sa force. Robin Pront révèle avec brio la beauté angoissante de cette forêt, qui, couplée à des personnages secondaires caricaturaux mais jouissifs, apporte cette énergie malsaine qui laisseraient envieux les Coen. Frères ennemis dans un pays déchiré, flamands et wallons devraient pouvoir se réconcilier (au moins sur le plan culturel) autour de cette pépite, dernière née d’un cinéma belge audacieux et décomplexé. 8/10
CONTRE – Les premières images laissaient présager d’un film noir, dans la lignée du mémorable Bullhead, de Michael R. Roskam – par ailleurs producteur du long-métrage adapté d’une pièce de théâtre. Il ne faudra que quelques minutes pour déchanter et percer à jour la supercherie Robin Pront. En bon élève biberonné aux polars de Refn et à la violence pop de Tarantino, le jeune belge s’embourbe dans une poussive histoire de loubards flamands. Fétichiste du bad boy, crâne rasé et cicatrices apparentes, Pront n’y va pas de main morte sur les effets de caméra et les jeux d’ombres et de lumières. L’homme semble se délecter de ces gueules cassées antipathiques qu’il n’a visiblement pas pris le temps d’étoffer pour sa transposition cinématographique. Pis, les deux protagonistes au centre de son premier long-métrage ne suscitent qu’une profonde aversion, rendant leurs tergiversations fraternelles pénibles jusqu’à l’épuisement. .
Après Belgica, le cinéma belge fait à nouveau la part belle à deux frères caractériels sur fond musical tapageur, pour un produit fini suscitant bien moins l’indulgence. Car, prétentieux, superficiel et peu aimable, le premier bébé de Robin se perd dans les bois et végète au stade embryonnaire. Avec trois fausses idées de mise en scène couchées sur une grande feuille blanche, Les Ardennes se démène tant qu’il peut pour dissimuler sa sombre banalité. La caméra s’excite telle une pucelle enfin prête à perdre sa virginité. Mais sa carrosserie tunée, qui se veut désespérément attrayante, peine à masquer qu’elle n’a absolument rien sous le capot. Sur fond de loyauté et d’enjeux amoureux, Les Ardennes s’égare bien vite en chemin. La soif de cinéma est là, mais la copie est clairement insuffisante. 2/10
La fiche
LES ARDENNES
Réalisé par Robin Pront
Avec Jeroen Perceval, Kevin Janssens, Veerle Baetens…
Belgique, Pays-Bas – Polar, Thriller
Sortie : 13 Avril 2016
Durée : 93 min
Rédaction – POUR : Julian ; CONTRE : ТНОМ РЯИ