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MADS MIKKELSEN | Portrait

Nom : Mikkelsen. Prénom : Mads, qui se prononce en fait [Mes] en danois mais que le monde entier s’évertue à massacrer. Signes distinctifs : regard perçant, présence magnétique, allure élancée, sourire charmeur.

Du haut de son mètre quatre-vingt-trois, le danois jongle avec les genres comme il bascule d’une langue à une autre. Il navigue de noble personnage à antagoniste parfaitement détestable et n’a jamais peur de jouer avec son image comme avec son corps, lui qui fut un temps danseur avant d’embrasser la carrière de comédien.

Celle-ci débute avec son premier rôle dans le film Pusher de son compatriote Nicolas Winding Refn (qui fera sensation ensuite avec Drive quinze ans plus tard), choc formel détonnant qui marque leur entrée fracassante dans le monde du cinéma d’auteur. Fort logiquement, il reprend huit ans plus tard son rôle dans la suite de ce polar de gangster dans Pusher 2 : Du sang sur les mains (Pusher II) où il tient cette fois-ci le rôle principal, son premier emblématique. Si NWR (avec qui il tournera aussi Bleeder) prouve qu’on devra désormais compter sur lui et suscite soudainement quelques comparaisons avec d’illustres aînés, Mads se rend déjà indispensable dans la peau d’une petite frappe lâche, peu futée mais attachante.

L’Europe à ses pieds

Polyglotte et fidèle, Mads Mikkelsen tourne avec de nombreux cinéastes européens, n’ayant pas peur d’apprendre le Français (le noble chevalier Michael Kohlhaas) et le Russe (Igor Stravinsky dans Coco Chanel), même si ce sont ses compatriotes qui lui offrent ses plus beaux rôles. Remarquable dans Open hearts de Susanne Bier, il est exceptionnel quatre ans plus tard dans After the wedding de la cinéaste, aux côtés de Sidse Babett Knudsen (L’hermine, La fille de Brest).

Dans A royal affair, film historique élégant et passionnant, il est tête d’affiche aux côtés d’une certaine Alicia Vikander, avant que celle-ci ne conquiert Hollywood, un Oscar à la clé quelques années plus tard. « Parfait, entre séduction et mystère », il brille dans le rôle complexe de conseiller du roi danois porteur des idéaux philosophiques des Lumières.

Basculant du costume d’époque à celui de cowboy, il tient ensuite le premier rôle dans le western de Kristian Levring, The Salvation, face aux frenchies Eva Green (qu’il retrouve après Casino Royale) et Eric Cantona.

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La notoriété mondiale

Mais à l’international, il connait la célébrité en 2006 grâce à son rôle inoubliable de Le Chiffre dans Casino Royale face à Daniel Craig et Eva Green. Le film est un très gros succès tant public que critique et il demeure même à l’heure actuelle le meilleur épisode de la saga James Bond. Son antagoniste qui saigne de l’oeil et qui fait preuve d’une certaine originalité dans la torture, marque la franchise durablement et lui ouvre de nouvelles portes à Hollywood.

Malheureusement, comme l’industrie américaine peut trop souvent le faire, celui-ci demeure trop souvent catalogué aux stéréotypes de « bad guy » dans des blockbusters pas forcément à la hauteur de son talent (Doctor Strange, Le choc des titans,  Les Trois Mousquetaires) même si Disney lui fera confiance pour camper un protagoniste plus ambigu dans Star Wars : Rogue One, spin-off qui ne donnera pas l’impression de complètement exploiter le potentiel de Galen Erso.

Mads Mikkelsen dans Hannibal

Mads Mikkelsen fait oublier le mythe créé par Anthony Hopkins

Grand personnage culte sur petit écran

Mads Mikkelsen sera également tenté par l’aventure sérielle, s’emparant pour le petit écran du personnage mythique de Hannibal Lecter dans les trois saisons de la série Hannibal, retraçant la trajectoire du célèbre docteur psychiatre / tueur en série, entre 2013 et 2015. Les fans sont conquis mais la série s’achève, faute d’audience suffisante pour la chaîne américaine qui diffuse le show. Depuis, à plusieurs reprises dont quelques échos récents, il a été question d’un revival avec un quatrième chapitre sans que ce voeu durable ne soit concrétisé pour l’instant…

Une preuve de l’impact qu’a eu cette relecture du personnage que l’on pensait éternellement rattaché à la prestation culte d’Anthony Hopkins dans Le silence des agneaux. Le danois réalise la prouesse de réduire au silence les sceptiques et de proposer au public une nouvelle version du complexe anthropophage, maniant l’élégance et l’ambivalence de cet esprit unique avec un talent inouï, allant même jusqu’à provoquer chez certains un véritable plaisir jubilatoire. Impassible et inquiétant, son Lecter est fascinant. Le reverra-t-on dans la peau du cannibale ?

Le goût du risque… payant

C’est sous la direction de son compatriote Anders Thomas Jensen, scénariste de grand talent ayant collaboré avec Susanne Bier et Lars Von Trier, que Mikkelsen tient ses rôles les plus culottés, n’ayant jamais peur de jouer des êtres à la morale plus que douteuse. Ainsi, il fait grincer de nombreuses dents en campant un boucher qui vend de la chair humaine dans Les bouchers verts et en interprétant un curé dans Adam’s apple, puis nous fait mourir de rire (jaune) dans le formidablement malaisant Men & chicken, bec de lièvre et addiction masturbatoire à la clé.

Mais c’est sous la direction de Nicolas Winding Refn et Thomas Vinterberg qu’il marque les esprits cinéphiles, entrant définitivement dans la catégorie des grands acteurs du vieux continent. À Venise, il présente Valhalla Rising dans lequel il incarne un viking borgne et mutique. À Cannes, trois ans plus tard, il décroche un prix d’interprétation amplement mérité pour son rôle d’enseignant accusé de pédophilie dans le brillant La chasse. Jamais dans la surenchère, capable de transmettre énormément avec une économie de mots épatante, il est couronné par le plus prestigieux festival du monde lui offrant enfin une consécration à la hauteur de sa maestria à l’écran.

Toujours excité par les challenges les plus coriaces, il fait ainsi confiance à Joe Penna pour tenir le rôle principal (et presque unique) de son survival polaire Arctic, pour lequel il revient à Cannes en mai dernier. L’acteur, dont l’incroyable maitrise n’est plus à prouver, porte ce drame de survie minimaliste sur ses solides épaules. Un défi tourné dans les éprouvantes conditions météorologiques, au plus près d’une réalité que les studios hollywoodiens ont souvent tendance à édulcorer.

Mads Mikkelsen dans Arctic

Arctic, au cinéma le 6 février 2019



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