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PHILIPPE DE BROCA : UN MONSIEUR DE COMEDIE

Petit-fils de peintre et fils de photographe, Philippe de Broca était un artiste rigoureux et polyvalent, auteur d’une trentaine de longs-métrages réalisés entre 1960 et 2004 qui constituent une œuvre marquée par le rythme, l’énergie, la vivacité et la jeunesse. Cette filmographie fait de Philippe de Broca un des maîtres français de la comédie virevoltante, pleine de fougue mais pas forcément dénuée d’une certaine gravité, même si celle-ci ne transparaissait que par petites touches.

Dans le très bel ouvrage que lui consacrent Philippe Sichler et Laurent Benyayer – déjà auteurs d’un livre sur Jean-Pierre Mocky en 2018 – on apprend ainsi que le cinéaste, qui avait accompli son service militaire durant la guerre d’Algérie, avait été profondément marqué par ce conflit et ses horreurs. De cette expérience traumatisante, De Broca avait tiré la volonté de ne jamais s’appesantir sur les drames et de faire de ses films des divertissements, légers en apparence, qui mettaient en images sa philosophie : « La vie n’existe que par le mouvement ».

L’ouvrage s’ouvre sur un avant-propos de Jean-Paul Belmondo, qui fut pour Philippe de Broca, Cartouche, l’Homme de Rio ou le Magnifique entre autres, dans lequel l’acteur évoque de grands souvenirs de tournages effectués dans une bonne humeur générale. S’ensuit une préface de Cédric Klapsich qui remet en perspective l’importance du réalisateur dans l’histoire du cinéma français. Viennent ensuite des éléments biographiques, des témoignages de ses coscénaristes et compositeurs attitrés. Ceux-ci ont le mérite d’être non seulement passionnants par les anecdotes racontées, mais aussi très honnêtes et n’occultent pas les zones d’ombres de Philippe de Broca, à qui certains prêtent une certaine forme de misogynie et des amitiés masculines parfois gâchées par une forme de rivalité ou de jalousie. 

Malle aux trésors

Après des témoignages de ses proches, les femmes de sa vie et ses enfants, on a droit à une filmographie détaillée sur plus de 200 pages. Chaque film est ainsi passé au crible : genèse du projet, tournage, analyse, accueil critique, témoignages. Cette partie du livre, la plus intéressante – ce qui précède l’est déjà – constitue une véritable malle aux trésors pour qui voudrait approfondir la vision des films de Philippe de Broca. 

Depuis Les Jeux de l’amour, produit grâce à l’argent donné par Claude Chabrol dont il avait été l’assistant, jusqu’à Vipère au poing, ultime long-métrage réalisé, la filmographie proposée enrichit considérablement le regard qu’on peut porter sur ce metteur en scène dont l’influence est immense (Spielberg a un jour reconnu sa dette envers lui pour Les Aventuriers de l’arche perdue, très inspiré par L’Homme de Rio) et le professionnalisme très loin de l’image de dilettante qu’il pouvait donner à tort. 

Comme dit précédemment, l’aspect apparemment désinvolte de ses personnages, toujours en mouvement, fuyant la routine de l’existence et de l’amour, masquait difficilement une certaine gravité, évoquée avec élégance et finesse. L’œuvre de Philippe de Broca était empreinte de légèreté ce qui n’implique pas forcément la superficialité ou le vide thématique, bien au contraire. 

Orné de très belles photos, riche d’informations passionnantes, Philippe de Broca un monsieur de comédie, permet de découvrir ou de redécouvrir un des très grands réalisateurs français, qui fut parfois sous-estimé par la critique mais dont les films ont marqué plusieurs générations de spectateurs et spectatrices au cinéma et à la télévision. 

Philippe de Broca livre