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PRISONERS

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Inégal

ISSU DE LA CLASSE OUVRIÈRE DE BOSTON, UN PÈRE DE FAMILLE APPREND QUE SA FILLE A ÉTÉ KIDNAPPÉE AVEC CELLE DE SON MEILLEUR AMI. IL EST PERSUADÉ QUE LE DÉTECTIVE EN CHARGE DE L’AFFAIRE A BÂCLÉ L’ENQUÊTE ET SE MET À SUSPECTER TOUTES LES PERSONNES DE SON ENTOURAGE.

Prisonniers et tortionnaires

Depuis son adaptation remarquée de Incendies qui a récolté de nombreuses récompenses, Denis Villeneuve est devenu un cinéaste qui compte outre-atlantique. Projet intialement confié à Bryan Singer (avec Bale ou Fassbender dans le rôle finalement obtenu par Jackman), Prisoners est arrivé dans les mains du québécois qui s’est occupé de le réaliser. Présenté récemment au TIFF, le long-métrage tourné dans la banlieue est d’Atlanta bénéficiait jusqu’ici d’une bonne réputation. Malheureusement, à l’issue de sa découverte, la déception domine devant ce thriller moins complexe et moins fulgurant qu’il ne souhaite l’être.

Tout d’abord, le film traîne véritablement beaucoup trop en longueur avec un faux-rythme particulièrement pénible soi-disant justifiable par la volonté des auteurs de disséquer en profondeur les réactions des personnages de chaque bord (victimes, enquêteurs, suspects…). Il y a également dans Prisoners un développement trouble autour de thématiques soulevées et finalement mal exploitées qui le rendent bancal et inabouti. Enfin, en plus d’avancer de façon trop systématique, le film souffre de ses lacunes grossières en termes d’écriture et d’interprétation (pourtant le casting était hautement prometteur). Il y a d’abord le policier (Gyllenhaal), qui n’avance pas et se contente de chercher des noises au père vengeur (Jackman) alors qu’il pourrait faire preuve d’un peu de jugeote (les empreintes aux pieds de la fenêtre… sérieusement !) qu’on pourrait appeler de la conscience professionnelle, au lieu de placer son égo et son zèle au centre de l’affaire. Il y a ensuite ce papa bien américain qui torture et séquestre en vain ce pauvre gamin retardé (Dano) dans sa maison abandonnée parce que sa nana a remis en doute sa capacité à prendre soin d’eux. Il y a enfin cette galerie de personnages secondaires peu étoffés et donc superflus, ralentissant inutilement l’avancement du film qui se noie dans son ambition psychologique.

Villeneuve avait confié la mission d’étoffer la psychologie des personnages au scénariste Aaron Guzikowski. Constatons que celle-ci n’a été que médiocrement remplie, avec des personnages particulièrement archétypaux et psychologiquement peu subtils : le mauvais flic orgueilleux plein de tics, le père colérique macho qui se réfugie dans la baston et l’alcool pendant que son épouse chiale et s’empiffre de médocs, le couple d’amis qui condamne et tolère à la fois, le retardé mutique qui fait les gros yeux avec ses binocles de timbré et sa belle mère roublarde… des personnages qui ont un sérieux goût de réchauffé hollywoodien. Si Prisoners n’est pas sans rappeler Zodiac de David Fincher, avec qui il accumule autant les points communs (la présence de Gyllenhaal, l’intrigue et l’enquête qui piétinent, la mise en scène, la photographie et les décors soignés, la lenteur handicapante…) que les défauts, il faut ajouter que ces personnages peinent à susciter la moindre compassion avec des acteurs en rajoutent tous un peu trop, avec un jeu tout en clignements de l’oeil de Jake Gyllenhaal et une interprétation plutôt foireuse de ce brave Hugh Jackman, mal à l’aise dans ce costume de père protecteur-tortionnaire. Ses accès de colère ne convainquent pas plus que ses échanges avec son fils qui sonnent encore plus faux que mes premières prestations à la flûte à la bec.

Ce n’est que dans le dernier quart du film que l’intérêt revient avec les premières pistes véritables de l’enquête – pistes qu’on avait ceci dit déjà devinées depuis fort longtemps. L’intérêt de ce film, finalement très dispensable, repose majoritairement sur le sens indéniable de la narration et de la mise en scène dont fait à nouveau preuve Denis Villeneuve, parvenant occasionnellement à instaurer un véritable malaise et une tension habilement gérée (avec notamment les scènes des malles noires ou du sous-sol du pasteur). On appréciera également la formidable photographie du brillant Roger Deakins. Cela ne suffira cependant pas à vous encourager à aller le découvrir en salles courant octobre, son inutile longueur mise à part. 

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PRISONERS

RÉALISÉ PAR DENIS VILLENEUVE

USA – 153 MIN – THRILLER, DRAME

AVEC HUGH JACKMAN, JAKE GYLLENHAAL

9 OCTOBRE 2013




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ffred
11 années il y a

Tout à fait d’accord…pour une fois ! c’est exactement ça…

Karen
Karen
11 années il y a

J’ai jamais vu une critique aussi naze. Je ne prendrais même pas la peine de développer pas ce commentaire, vu que l’auteur ne prend pas la peine de développer ses critiques. Et puis, comment prendre au sérieux l’auteur de l’article quand, dans le Nouvel Obs, il nous apprend que « un père qui part à la recherche de ses deux filles disparues ». Puis comment le prendre au sérieux quand, sur son propre blog, ce n’est plus des deux filles (du père donc, haha) dont il nous parle, mais d’une fille et de « SON MEILLEUR AMI ». Bordel, c’était une fille et la fille des voisins, c’est pas compliqué. Pas deux soeurs, pas le meilleur copain, juste la fille des voisins, voyons.

bruno31100
bruno31100
10 années il y a

un soupçon de ZODIAC bien trop relevé; une pincée de LE SILENCE DES AGNEAUX… une impression de déjà vu; quelque peu déçu malgré un maintien constant en alerte.

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