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RESPIRE

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Belle confirmation

Charlie, une jeune fille de 17 ans. L’âge des potes, des émois, des convictions, des passions. Sarah, c’est la nouvelle. Belle, culottée, un parcours, un tempérament. La star immédiate, en somme. Sarah choisit Charlie.

Étouffante amitié.

Il y a trois ans, la comédienne Mélanie Laurent franchissait le cap en réalisant son premier long-métrage, Les adoptés. Ce premier essai était transformé de fort belle manière, laissant apercevoir un potentiel réel de cinéaste et une touchante sensibilité. Son second film, Respire, très bien accueilli lors de la Semaine de la Critique en mai dernier, autorisait une certaine attente.

Pour cette deuxième réalisation, Mélanie Laurent fit le choix d’adopter librement le roman d’Anne-Sophie Brasme paru il y a plus de dix ans. Influencée par certains auteurs l’ayant dirigée, marquée par le fabuleux La vie d’Adèle (auquel Respire fut régulièrement comparé lors de sa présentation cannoise, à tort comme à raison) mais surtout par le très troublant Martha Marcy May Marlene (de Sean Durkin), Respire nous évoque aussi de belles oeuvres comme Naissance des pieuvres ou Cracks sur la fascination malsaine et les troubles de l’amitié adolescente. On notera d’ailleurs que ces deux films, aussi réussis que subtils, ont été l’oeuvre de réalisatrices. Mélanie Laurent, à la hauteur de ses aînées, confirme avec Respire ce qu’elle avait laissé entrevoir : un sens intéressant de la mise en scène et une certaine aptitude à la direction d’acteurs et à la création de beaux moments d’émotion. 

De plus, en collaborant à nouveau avec Arnaud Potier (dir. photo) et Guerric Catala (monteur), elle s’assure à nouveau un film plastiquement très soigné et particulièrement fluide. Le spectateur se retrouve embarqué dans le quotidien de la jeune Charlie, de la maison au lycée aux vacances en bord de mer.

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Il serait fort dommageable de trop en dire sur l’histoire de Respire et de compromettre une partie de l’effet produit par son visionnage… Toutefois, il convient de saluer la qualité indéniable de ce 2e long-métrage ainsi que les deux comédiennes principales participant à l’aventure. Nous retiendrons particulièrement la remarquable prestation de la jeune Joséphine Japy qui livre une performance pouvant lui offrir un sacre aux prochains Césars, où elle pourrait légitimement succéder à la fantastique Adèle Exarchopolous – récompensée pour… La vie d’Adèle, justement. La prometteuse actrice ne devrait pas tarder à voir affluer les propositions tant son interprétation mérite d’être appréciée du premier au dernier plan. 

Face à elle, Lou De Laâge n’est pas en reste en malmenant sa partenaire avec puissance et conviction, même si son jeu parait parfois plus appuyé sur une paire de scènes, biaisant légèrement la force de celles-ci (on pense notamment à celle de la « menace », un brin décevante). L’évolution de cette amitié nocive suit son fil, parfois de façon un brin téléphonée mais en conservant une cohérence certaine. Rien de trop pénalisant puisque Respire produit véritablement l’effet escompté, laissant le spectateur abasourdi lorsqu’arrive le générique de fin…

Après Les adoptés, Mélanie Laurent confirme qu’elle se trouve à l’aube d’une carrière qui pourrait devenir plus intéressante derrière la caméra que devant. Nous avons hâte d’en voir davantage. 

La fiche

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RESPIRE
Réalisé par Mélanie Laurent
Avec Joséphine Japy, Lou de Laâge, Isabelle Carré
France – Drame
Sortie en salles : 12 Novembre 2014
Durée : 91 min




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ChonchonAelezig
10 années il y a

J’en suis ravie. Mélanie Laurent a tellement été décriée, insultée, méprisée. Même pour son premier film, maîtrisé, il était de bon ton de critiquer PARCE QUE c’était Mélanie Laurent. Je suis contente de ton objectivité et contente de voir que le film a l’air bon !!!

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10 années il y a

[…] quelques jours de la sortie du film Respire, nous avons rencontré les deux jeunes comédiennes à l’affiche du second long-métrage de […]

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10 années il y a

[…] l’avez sûrement constaté. Le second film de Mélanie Laurent est notre « coup de coeur » ciné du mois. A l’occasion de la sortie en salle de RESPIRE, LE BLEU DU MIROIR et […]

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10 années il y a

[…] Si vous aimez les romans-photos sur papier glacé, tentez le coup. Sinon passez votre chemin, il y a bien mieux à voir cette semaine. En attendant de retrouver Jennifer Lawrence dans le troisième Hunger […]

Widescreen
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10 années il y a

Trop impressionniste (mais je me plante peut-être sur ce que je veux dire) pour émouvoir sauf à quelques occasions (celles d’un retour à une narration plus descriptive) le film reste plaisant, mais pas emballant. Pas de spleen romantique comme chez S. Coppola. Pas assez de turbulences dans ces vies d’ados trop banales. Le cas de la mère (et des adultes en général) est plus intéressant. Mais c’est passer un peu à côté du sujet.

Julie Pommeraye
Julie Pommeraye
9 années il y a

Je suis obligée de commencer cet « avis » en précisant que, de mes 18 ans à mes 21 ans, j’ai vécu une relation que l’on peut qualifier en termes psychiatriques de « perverse narcissique » avec une jeune femme de mon âge. Une jeune femme qui portait des robes à fleurs, avec qui j’ai passé des vacances à la campagne, qui m’a appris à rouler des cigarettes, et dont la mère était folle.
Autrement dit, j’ai retrouvé dans Respire beaucoup (trop, peut-être) de choses de mon vécu personnel, ce qui m’empêchera d’avoir un avis foncièrement concentré sur l’aspect esthétique/sur la forme du film. J’ai par ailleurs lu le livre. Et le film lui apporte considérablement.
Je ne suis de toute manière vraiment pas douée pour juger d’un film sur ses aspects très techniques : je n’ai pas eu dans mon cursus scolaire l’occasion d’apprendre à faire des analyses de films. Je me fie beaucoup à mes émotions fasse à ce qui se passe à l’écran. Une sorte de bovarysme cinéphile me direz-vous… Le cinéma est l’art qui m’envoie le plus loin dans les contrées de l’imaginaire et de l’inconscient, qui sait me mettre face à mes désirs, mes angoisses.
Je commencerai par dire que le tout début de Respire m’a presque inquiétée : j’ai pensé que j’allais devoir donner raison à ceux qui l’ont assimilé à La vie d’Adèle, qui est devenu un des films de ma vie, et forcément la comparaison n’aurait pas été favorable. Le début chez Charlie, la scène de cours de philo où il est question de la passion et qui anticipe ce qui va se passer… Presque les mêmes plans. Fort heureusement l’effet s’estompe : Mélanie Laurent va assez vite dans la mise en place de cette vie plus ou moins tranquille de Charlie, nous fait rapidement comprendre qu’elle est assez réservée mais avec ses amis et ses repères. Ce qui n’est pas le cas dans le livre.
Arrive Sarah, la nouvelle. Magnétique et effrontée, enthousiaste et secrète. Elle repère immédiatement la relative solitude de Charlie et s’introduit dans sa vie. D’emblée, la voix de Lou de Lâage envoute le spectateur, tout comme elle envoute le personnage de Joséphine Lapy, qui est une vraie révélation dans le rôle de cette ado ordinaire qui succombe à une relation des plus toxiques. Les deux comédiennes sont incontestablement la principale force du film.
Il est difficile de rendre avec justesse le trouble que l’on éprouve quand on est une jeune fille de 17 ans, que l’on tombe amoureuse d’une amie, que l’on ne s’en rend même pas compte. Car oui, Respire n’est pas simplement l’histoire d’une « amitié vénéneuse » comme j’ai pu le lire à plusieurs reprises : Charlie éprouve clairement des sentiments autres pour Sarah. En témoignent deux moments importants, parmi d’autres : la scène du « baiser pour de faux », qui précède la gifle, où ça crève les yeux que Charlie ne joue plus, ainsi que la scène près de la fin où elle la regarde dormir et se rapproche d’elle, si ce n’est pas typique d’un comportement amoureux, je ne sais pas ce que c’est et ne le saurai jamais. Mélanie Laurent filme donc, sans génie, mais sans céder à la facilité non plus, et avec une pudeur bienvenue, ce par quoi nous sommes tous plus ou moins passé : l’éveil au désir qui fait du mal, à l’amour pourri d’emblée car non partagé, et qui vire à l’obsession. Ce n’est vraiment pas rien. Ça met même mal à l’aise, tant il est impossible de ne pas se retrouver dedans, en ce qui me concerne, et si ça me concerne, j’imagine que ça concerne également pas mal de gens.
Une autre force du film est de ne jamais rester dans une stigmatisation des personnages et de dépasser le simple stade de la « méchante » qui persécute la « gentille ». Bien évidemment, Sarah est odieuse. Dès la première fois où elle vient chez Charlie, elle prend une dimension inquiétante. Mais elle souffre, également, elle est seule, sans doute de manière bien plus forte que Charlie. Elle ne devient véritablement violente que lorsque Charlie elle-même commet une erreur en s’introduisant dans un terrain qui ne lui était aucunement autorisé. D’une manière générale, Mélanie Laurent parvient à rendre compte de manière saisissante du mécanisme de la perversion narcissique, où les choses sont toujours bien moins nettes que ce nous pourrions penser à vue de nez. La victime est un complice, involontaire, de ce qui lui arrive. Le fait d’être dans l’incapacité d’en vouloir à celui qui vous fait du mal fait partie de ce mécanisme, ce que montre par ailleurs le personnage d’Isabelle Carré, sans doute la partie un peu lourde du film…
Voilà ce que je peux dire avec un peu de recul. Il y en avait besoin, puisque je suis sortie de la salle en ayant besoin de faire des exercices de respiration.

Katy Card
Katy Card
9 années il y a

Bonjour,
J’ai beaucoup apprécié ce film. Très très bon thème qui existe réellement partout autour de nous et peut nous entraîner dans la violence. Les filles jouent super bien leur rôle sans exagération. J’ai vécu avec une personne toxique et le fait de voir deux lycéennes jouant ce rôle m’a vraiment émue…
Ce film est vraiment d’actualité. Ce film est très bon. Les acteurs sont bons.
Félicitations à toute l’équipe. !! Bonne chance pour la suite à vous toutes et à vous tous !

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9 années il y a

[…] nous a époustouflée dans Respire de Mélanie Laurent. Je lui avais prédit sa présence aux prochains César. Mon pronostic […]

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9 années il y a

[…] que l’on imaginait déjà l’une des deux jeunes actrices de Respire récompensée pour leur belle prestation dans le film de Mélanie Laurent, la mauvaise surprise est […]

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