SÉLECTION | 25 films à découvrir en 2022
L’exercice, comme chaque année, est éminemment subjectif, et avant tout une histoire de choix. C’est dans cette idée que nous proposons une sélection de 25 films devant sortir sur les écrans français dans le courant de l’année 2022. Cette liste de films représente une certaine vision du cinéma d’auteur, internationale, célébrant la multiplicité de langues et d’horizons composant le cinéma aujourd’hui. En premier lieu, un certain nombre de films ont déjà une date de sortie, composant la première base sur laquelle nous pouvons nous projeter en cette année qui a déjà livré un très beau mois de janvier, avec de très beaux films comme Little Palestine, Licorice pizza ou Vitalina Varela.
Un premier semestre prometteur
Le premier semestre 2022 réserve un certain nombre de très belles sorties, dont beaucoup sont issues de la très riche édition de la sélection Un Certain regard du festival de Cannes de l’année passée. Dans quelques jours sort Great freedom, film allemand de Sebastian Meise qui étudie un angle peu mis en avant de la Seconde Guerre mondiale, la déportation des homosexuels sommés de faire le « solde » de leur peine après la libération des camps. Mené par un Franz Rogowski (Ondine) absolument convaincant, le film a reçu le grand prix du festival Chéries chéris il y a quelques semaines.
The Innocents du norvégien Eskil Vogt renouvelle le genre au cœur d’un film qui épouse le regard d’enfants. Durant l’été norvégien, un groupe d’enfants révèle de mystérieux et inquiétants pouvoirs lorsque les adultes ne regardent pas. Grande figure d’un certain type de cinéma qui aime présenter ce qu’on appelle « les enfants méchants », le fidèle collaborateur et ami de Joachim Trier s’inscrit dans l’héritage nordique du fameux Morse de Tomas Alfredson et signe un thriller surnaturel singulier et captivant au coeur d’un cité populaire, en lisière de forêt.
Deux autres films issus d’Un certain regard 2021 ont attiré notre attention avec en premier lieu Les poings desserrés de Kira Kovalenko. Le film n’est pas sans rappeler l’âpreté de Tesnota de Kantemir Balagov, camarade d’université de la réalisatrice, sous l’autorité d’Alexandre Sokourov. Située dans une petite ville minière d’Ossétie du nord, l’histoire raconte la lutte d’Ava, jeune femme contrôlée d’une main de fer par un père seul pour élever sa famille après un drame. La réalité sociale très dure décrite par Kira Kovalenko est bouleversante, récompensée par le grand prix Un certain regard.
Le 16 mars prochain sort en France Moneyboys de CB Yi, réalisateur né en Chine mais élevé en grande partie en Autriche. Après des études auprès du grand réalisateur autrichien Michael Haneke, c’est un véritable coup de cœur que réalise l’auteur, avec la révélation de l’acteur Kai Ko, star en Chine et à Taïwan, mais inconnu des écrans européens. Le film évoque la prostitution masculine, aidé par une mise en scène d’un grand dynamisme, recourant au plan séquence et à une image sublime magnifiée par le directeur de la photographie Jean-Louis Vialard.
Après le festival de Cannes, c’est la dernière édition de son concurrent vénitien qui nous amène le nouveau film de Stéphane Brizé, Un autre monde, réunissant le réalisateur français avec Vincent Lindon pour une troisième fois consécutive après La loi du marché (2015), et En guerre (2018). Cette trilogie sociale est bouclée de la plus belle des manières, avec cette histoire consacrée à un cadre supérieure qui voit sa vie familiale se désintégrer en même temps que son entreprise qui doit supporter un nouveau plan social pour conforter des actionnaires américains. Puissant et appliqué dans sa mise en scène, c’est un rendez-vous à ne pas manquer en ce premier trimestre.
Présenté à Locarno l’été passé, After Blue (Paradis sale) marque le retour au premier plan du réalisateur Bertrand Mandico après sa bombe Les garçons sauvages. Réinvestissant le film fantastique avec toujours un dispositif usant de couleurs et effets très particuliers, Mandico poursuit une œuvre inclassable en marge du cinéma d’auteur français, célébrant une envie de faire un cinéma de genre dans toutes les acceptions du terme. Sortie le 16 février prochain.
Belle surprise de l’automne 2021 au festival international de La Roche-sur-Yon où il gagne le grand prix, L’ombre d’un mensonge est le nouveau long-métrage de l’acteur réalisateur belge Bouli Lanners (Les géants, 2011). Première incursion dans le domaine de la romance, le film se situe sur une petite île écossaise, tourné presque intégralement en langue anglaise, suivant le destin de Philippe, un homme mystérieux qui subit une attaque qui le rend amnésique. Sensible et subtil, c’est l’évocation d’un nouveau départ qui sonne celui d’une histoire d’amour surprenante et touchante.
Le prolifique et talentueux Ryusuke Hamaguchi revient dans les salles françaises avec un nouveau film après son succès Drive my car, prix du scénario à Cannes l’été dernier. Contes du hasard et autres fantaisies a une structure inhabituelle : composé de trois histoires distinctes, l’histoire développe trois visions du fondement des relations amoureuses. On y retrouve la force du cinéma du réalisateur japonais, cet art du dialogue et de la mise en abyme des relations entre ses personnages, culminant par une rencontre fortuite entre deux femmes, qui d’inconnues finissent par se troubler par le plus grand des hasards. Le film a gagné un ours d’argent l’an passé à la Berlinale 2021, début d’une superbe année pour Hamaguchi.
Une Berlinale peut en cacher une autre, avec Les passagers de la nuit de Mikhaël Hers. Son film précédent, Amanda (2018), nous avait émus au plus haut point et dessiné plus finement la belle trajectoire initiée par Ce sentiment de l’été en 2016 par le réalisateur français. Le casting qu’il a composé est mené par Charlotte Gainsbourg, Emmanuelle Béart et la très remarquée Noée Abita, notamment dans Slalom de Charline Favier. Ce trio d’actrices évolue au début des années 1980 au moment de l’ouverture des ondes et des radios libres, climat propice à la naissance d’une émotion que Mikhaël Hers sait faire émerger comme peu de ses pairs.
On peut enfin signaler la sortie du dyptique Suis-moi je te suis et Fuis-moi je te suis du réalisateur japonais Kôji Fukada. Remarqué dès son premier film, le très beau Au revoir l’été qui convoquait Rohmer et Stand by me (1986) de Rob Reiner. Il a depuis impressionné par des films comme L’infirmère (2020) ou Le soupir des vagues (2021). Cette histoire d’amour en deux chapitres, pleine d’indécisions et de revirements de situations, respire le charme qui nous avait tant attiré lors de la sortie du tout premier film de l’auteur en décembre 2014.