UNE HISTOIRE DE CINÉMA DE QUARTIER
De 1990 à 2007, sur Canal+, Jean-Pierre Dionnet présenta l’émission Cinéma de quartier puis Quartier interdit, programmant des centaines de films et les présentant avec enthousiasme, originalité et sa passion coutumière. Westerns spaghettis, péplums, films de vampires, mais aussi grands classiques et comédies, merveilles du cinéma tchèque et pépites asiatiques alternèrent sur la chaîne cryptée. Avec parfois des films très rares, d’où des recherches parfois difficiles de copies et de droits qui faisaient de cette programmation une véritable aventure, une quête de films à faire découvrir et à réévaluer aussi dans certains cas.
Sylvain Perret, fondateur du webzine 1Kult, responsable éditorial chez Gaumont Vidéo, entre autres activités, sort son premier ouvrage et le consacre donc à ces programmes qui ont contribué à sa passion du cinéma. Une Histoire de Cinéma de quartier offre une vision exhaustive de la diversité de ce que proposait alors Jean-Pierre Dionnet aux spectateurs, en listant l’intégralité des œuvres diffusées. Mais dévoile aussi bien sûr une partie des coulisses, rend hommage aux interlocuteurs et aux collaborateurs de l’ombre – Anne Vincendeau, Patrice Verry, Carlos Sylva… – et souligne l’importance de Cinéma de quartier qui offrait parfois des versions avec scènes inédites ou fins alternatives, selon les copies qui avaient pu être dénichées et qui a fortement contribué à donner à des films, ou à des genres ou sous-genres autrefois peu considérés leurs lettres de noblesse. Une démocratisation de la cinéphilie, devenue peut-être moins élitiste, plus accessible s’est produite durant cette période et le travail de Jean-Pierre Dionnet et de ses collaborateurs n’est sûrement pas étranger à cette évolution.
Cet ouvrage de plus de 260 pages, très richement illustré par des photos – films, affiches, screens de l’émission – et préfacé par Bertrand Mandico constitue à la fois une formidable madeleine de Proust pour ceux qui ont connu l’émission et, pour les autres, une très belle découverte d’un programme issu d’une époque sans plateformes et sans internet, où ces rendez-vous hebdomadaires prenaient autant d’importance qu’une sortie au ciné-club local ou que les autres grands rendez-vous cinéphiliques diffusés à la télévision à cette époque : le cinéma de minuit de Patrick Brion et le ciné-club de Claude-Jean Philippe. Cinéma de quartier proposait des films différents de ces autres points d’ancrages, mais ils étaient parfaitement complémentaires pour se construire une cinéphilie éclectique, curieuse, sans idée préconçue, réunissant films populaires et œuvres plus exigeantes.